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Réformes annoncées de la Fonction publique : notre réponse à Stanislas Guerini

Au mois d’avril 2024, Stanislas GUERINI (Ministre de la Fonction Publique), Bruno LEMAIRE (Ministre de l’Economie) et Gabriel ATTAL (Premier Ministre) se sont exprimés sur leur vision de l’avenir du système social français et des services publics.
Voici nos commentaires concernant leurs déclarations.

***

INTRODUCTION

En 2007, Denis Kessler, vice-président du MEDEF assurait que :
« Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. […] Il est grand temps de le réformer. […] La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le Programme du Conseil national de la Résistance ! »

Effectivement, on ne peut pas lui donner tort : à la sortie de la 2e Guerre Mondiale, les hommes et les femmes qui ont connu l’horreur et la ruine décident de rétablir les 40 heures de travail par semaine (comprendre 8 heures par jour), ainsi que la création de la Sécurité Sociale, de la Retraite, et de la Fonction publique.

Tous ces progrès que Bruno LEMAIRE appelle « le tout gratuit », sont en réalité le fruit de l’imagination des travailleurs et il n’est pas gratuit, des gens le payent : les travailleurs eux-mêmes. De l’avis de la CGT, ils sont le sens de l’Histoire. Ils sont le Progrès.
Ce Progrès est un frein aux logiques néo libérales défendues par M KESSLER et il ne cesse d’être attaqué.
Les dernières attaques en date, donc, ce sont les fameuses citations de M GUERINI et de M ATTAL.

Licenciement dans la fonction publique

PREMIERE CITATION

Stanislas GUERINI a dit le 10/04/2024 au micro de France Inter que « le Statut de la Fonction Publique c’est la garantie de l’emploi (…), mais le Statut de la Fonction Publique n’a jamais expliqué, pas même en 1946 lorsqu’il a été instauré, qu’on ne pouvait pas licencier quelqu’un qui ne fait pas bien son travail. »
Analyse Historique

C’est tout à fait vrai ! La Loi du 19 octobre 1946 dispose dans son Art. 135 que « Le fonctionnaire qui fait preuve d’insuffisance professionnelle est, s’il ne peut être reclassé dans une autre administration ou service, soit admis à faire valoir ses droits à la retraite, soit licencié. »

Ces dispositions ont même fait l’objet d’une mise à jour en 2022 au travers d’une loi que M GUERINI a lui-même présenté au Sénat et qui confirme que le fonctionnaire peut être licencié dans les cas suivants : « 1) L’abandon de poste, 2) le refus de 3 postes au retour d’une disponibilité, 3) l’insuffisance professionnelle 4) le dégagement des cadres 4) l’absence de respect de ses obligations. »

Pourquoi tout ce tapage ?
Il semble que de tels propos, s’ils n’ont pas pour objectif de créer une loi qui exige déjà, ont par contre la fâcheuse tendance d’échauffer les esprits et désinformer nos usagers et concitoyens. Finalement, ne s’agit-il pas de rendre désirable auprès de la population la poursuite du saccage de nos conditions de travail ?

Permis de licencier
Après avoir facilité à l’extrême les licenciements dans le privé en 2016 avec l’adoption de la Loi El Khomri, le gouvernement essaye-t-il de résoudre ses problèmes budgétaires en facilitant à l’extrême les licenciements dans la Fonction Publique ?

Gains de productivité et santé des agents
A moins que le burn out généralisé soit également un des effets attendus de la réforme ? En effet, Malgré les suppressions d’emploi, il semble qu’on ne laisse pas mourir trop de personnes dans les hôpitaux, il semble que les enseignants continuent de faire cours dans des classes surchargées et il semble qu’un certain niveau de productivité parvienne à se maintenir à la DGFiP.
Mais les gains de productivité ne sont jamais gratuits et au cas particulier, ce sont les agents qui les payent, au prix de leur santé physique et de leur santé mentale.

Après tout, qu’importe si au nom des réductions budgétaires, il faut que les agents quittent l’administration « Par la Porte ou par la Fenêtre » ?
« Par la Porte ou par la Fenêtre », c’est le titre d’un documentaire sorti en 2023 qui relate l’« Affaire des Suicides de France Telecom ». Malheureusement, il ne nous paraît pas outrancier d’y faire référence.

En effet, au cours des derniers mois plusieurs suicides et tentatives de suicide ont fait l’objet d’enquêtes des Formations Spécialisées à la DGFiP. Merci d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

Prime au Mérite et Chacun pour Soi

DEUXIEME CITATION
De Stanislas GUERINI au micro de France Inter, toujours : « Quand vous avez un collectif de travail de 100 personnes et qu’il y en a une qui ne fait pas son travail, allez-me dire que ce n’est pas démotivant pour les autres ! »

Loin de favoriser la sérénité dans les services, M GUERINI jette encore un peu plus d’huile sur le feu en exacerbant un clivage fantasmé : celui qui opposerait les agents « qui seraient méritants et travailleurs » et les autres « qui seraient paresseux et profiteurs ». Promettant des primes au mérite pour les uns et la porte (ou la fenêtre) pour les autres.

« Diviser pour régner », « Stratégie du chacun pour soi », voilà une philosophie qui ne fait pas honneur à l’esprit dans lequel a été créé notre service public. Par ailleurs rien n’indique que les 99 agents du collectif imaginaire de M GUERINI toucheront une prime au mérite. A budget contraint, si seulement 10 d’entre eux pourront toucher une enveloppe, il n’est pas difficile de penser que ces 10 agents là vont se découvrir très vite 90 bons à rien dans leur équipe. Bonne ambiance. Voilà qui ne va pas favoriser les collectifs de travail.
Ce qui est réellement démotivant, c’est de renoncer à faire réellement un travail de service au public, faute de temps, faute de moyens.

En tant qu’élus d’une instance qui a pour responsabilité la santé et la sécurité des agents, il est de notre devoir de prévenir notre Ministre : ouvrez les yeux ! Vous faites fausse route ! Vous voulez de la performance ? Donnez-nous des agents !

Semaine en 4 jours

TROISIEME CITATION
C’est celle de Gabriel ATTAL, lors de son discours de politique générale du 30/01/2024 : « J’ai demandé à tous mes ministres d’expérimenter la semaine en 4 jours sans réduction du temps de travail ».
1er mai et 40 heures par semaine

Il suffit d’un bref calcul pour comprendre que 35h de travail réparti sur 4 jours, cela représente 9h de travail par jour en comprenant la pause déjeuner. Pour les collègues qui ont choisi un module horaire à 38h30, c’est plus de 10 heures de travail par jour.

Ce genre d’idée fait complètement l’impasse sur le fait que les agents puissent avoir une vie en dehors du travail, sans même parler d’éventuelles responsabilités parentales, ou de temps de transports conséquents.
Et, encore une fois, il semble que ce ne soit pas le sens du Progrès :
En 1916, le temps de travail des jeunes femmes est limité à 10h par jour.
En 1936, les salariés obtiennent des journées de 40h par semaine,
Puis 39h en 1982 et finalement, 35h en 2002.

La limitation du temps de travail à 8h par jour est un marqueur culturel important du monde du travail. La preuve en est : le 1er mai nous nous sommes tous arrêtés de travailler pour la célébrer.
La CGT revendique les 32h payées 35.

Par conséquent : pour la CGT, la semaine EN 4 jours sans réduction de temps de travail, ce sera non.
Nous revendiquons la semaine DE 4 jours, de 32h, sans perte de salaire.
Les avantages économiques de la réduction du temps de travail sont connus : elle contribue à créer directement des emplois (+ 350 000 emplois directs au moment du passage à 35h) ; elle améliore la santé et la productivité des salariés ; elle augmente leurs qualifications.

Plus largement, le passage réel à 32 heures est potentiellement source de création de 4 millions d’emplois.
Par ailleurs, l’expérience a déjà été menée avec succès en France et à l’Etranger.

Temps de travail et Lutte contre le Réchauffement Climatique
Le défi majeur que nous devrons relever dès cette année, c’est celui du Réchauffement Climatique. Dans la Cadre de sa Stratégie Bas Carbone, la France s’est fixée pour objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
La « Neutralité Carbone », qu’est-ce que c’est ? Cela signifie que les émissions nationales de gaz à effet de serre devront être inférieures ou égales aux quantités de gaz à effet de serre absorbées sur le territoire français par les écosystèmes gérés par l’être humain.

Nous avons donc deux leviers à utiliser conjointement :
1) augmenter les surfaces naturelles capables de piéger le dioxyde de carbone,
2) réduire drastiquement le volume de gaz à effet de serre que nous émettons.

Sachant que le volume de gaz à effets de serre que nous émettons est directement liée aux quantités d’énergie que nous consommons, l’atelier « Travail et Climat » de la Convention Citoyenne sur le Climat avait proposé de réduire le temps de travail à 28h par semaine.

En conclusion : si nous acceptons que la préservation des conditions de vie sur terre est notre priorité, alors nous devons également envisager que les plus méritants seront ceux qui se résoudront à travailler moins et à consommer moins.

A ce sujet, nous avons remarqué que la DDFiP 78 avait publié en ligne son Plan Départemental de Transition Ecologique. Nous espérons que ce document fera bientôt l’objet d’un point à l’Ordre du Jour d’un prochain CSAL.

Article publié le 6 mai 2024.


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